Droit des propriétaires initiant un plan d’aménagement de détail d’obtenir une décision au fond

Me Elodie Surchat a obtenu gain de cause au Tribunal cantonal fribourgeois concernant une décision de la Direction cantonale qui avait pour effet d'annuler la procédure d'adoption d'un plan d'aménagement de détail (PAD) initié par les propriétaires fonciers, conformément à l'art. 67 LATeC, et de leur imposer une nouvelle mise à l'enquête. Dans les faits, l'autorité communale avait d'abord annoncé à tort aux opposant·es au PAD, en 2018, que la procédure était annulée, avant de poursuivre le traitement de la procédure d'approbation du PAD, suite à la contestation de cette "décision" par les initiants du PAD. Ces derniers avaient exposé à l'époque que la législation cantonale ne permettait pas à l'autorité communale d'annuler une procédure de PAD initiée par des propriétaires. Se ravisant, la commune a donc poursuivi le traitement de ce dossier et a, en 2021, rejeté les oppositions et adopté le PAD. Les opposant·es ont recouru contre cette décision, arguant que la procédure avait été annulée en 2018 et qu'une nouvelle mise à l'enquête était nécessaire, ce que la Direction cantonale a admis. Les propriétaires à l'initiative du PAD ont ensuite recouru avec succès au Tribunal cantonal contre cette décision de la Direction.

Face à un PAD proposé par des propriétaires, la position de la commune n’est pas identique à celle qu’elle a lorsqu’elle établit elle-même ce genre de planification.
— Tribunal cantonal

Le Tribunal a précisé que, face à un PAD proposé par des propriétaires, la position de la commune n'est pas identique à celle qu'elle a lorsqu'elle établit elle-même ce genre de planification. Dans ce contexte, elle ne peut refuser un PAD établi par des propriétaires que pour des motifs raisonnables, en principe en lien avec ses buts d'aménagement. Le droit de déposer un projet de PAD que l'art. 67 al. 1 LATeC accorde aux propriétaires fonciers a donc pour effet de circonscrire la liberté du planificateur communal en le forçant à se déterminer sur un projet concret. Même si la commune garde la maîtrise de son aménagement et n'est pas liée par les propositions de planification, elle ne peut pas s'abstenir; si elle n'a pas de motifs pertinents pour refuser ou modifier le PAD, elle devra adopter la proposition des propriétaires fonciers.

Le Tribunal a confirmé, malgré que la procédure par-devant l'autorité communale n'avait pas été exempte d'erreurs, que le PAD en question avait été correctement mis à l'enquête et que les personnes qui s'estimaient touchées par celui-ci avaient eu l'occasion de faire opposition. Ainsi, la communication de la commune de 2018 annonçant aux opposant·es l'annulation de la procédure et une nouvelle mise à l'enquête n'avait pas porté préjudice à ces derniers et ne devait pas être qualifiée rétrospectivement d'acte décisionnel ayant force obligatoire et liant la commune.

Enfin, comme relevé encore par l'avocate, le Tribunal cantonal a retenu que la décision de la Direction ne pouvait pas non plus être confirmée puisqu'elle donnerait lieu à une nouvelle mise à l'enquête, offrant à nouveau à toute personne intéressée la possibilité d'interjeter opposition.

Arrêt TC FR 602 2021 145 du 8 avril 2022